lundi 8 juillet 2013

Re: Walden -Tinel de la Chartreuse



Re : Walden – La technique et l’environnement

Nous nous sommes « exilées » samedi dernier au Tinel de la Chartreuse, à quelques minutes de navette du centre névralgique d’Avignon pour assister à Re : Walden de Jean-François Peyret.
Invité en 2009 par l’Experimental Media Performing Art Center, Peyret a profité de ce séjour aux États-Unis pour explorer un de ses textes coup de cœur : Walden ou la vie dans les bois d’Henry David Thoreau. Ni roman, ni journal, cette œuvre littéraire est phare de la philosophie libertaire et écologiste. Elle pose des raisonnements sur l’homme et la nature, l’animalité et la technique; Thoreau s’exile en effet dans les bois en pleine révolution industrielle américaine. Peyret utilise l’œuvre comme matériel textuel pour une création théâtrale autour de la mémoire de l’acteur et des dispositifs d’intelligence artificielle, comme les voix de synthèse et les traducteurs automatiques.

Entre la scène et la salle

Les rapports de l’Homme à la technique sont donc le cœur de Re : Walden, tant sur le plan du contenu que de l’esthétique. La régie placée devant la scène était une part intégrante, voire omniprésente, du spectacle. Elle faisait office d’écran entre le spectateur et les comédiens. Le choix du Tinel de la Chartreuse n’excluait aucunement la possibilité d’aménager une régie derrière l’auditoire, ou simplement cachée par des rideaux autoportants. Ce choix de Peyret de l’étendre sur plusieurs postes informatiques, couvrant tout le front de contact entre scène et salle, témoigne de sa volonté de mettre de l’avant les thèmes mentionnés précédemment. Il y avait d’ailleurs quelques moments d’interaction verbale et physique entre les techniciens et les comédiens qui, vers la fin du spectacle, circulaient dans tout l’espace de la salle et des couloirs de la chartreuse, pendant que leurs doubles virtuels étaient projetés sur scène. Le rapport strictement frontal est transgressé par la pénétration des acteurs dans l’espace du public, ce qui nous amenait à rester conscients de notre environnement.

Architecture
Salle du Tinel

Un cyclorama blanc a même été levé au début de la pièce pour dévoiler les murs nus du Tinel, sur lesquels étaient projetées les images vidéos. Le mur du fond comportait une porte double en bois en plein centre et était utilisée pendant le spectacle. La partie supérieure de ce mur est sculptée et le bas est lisse. La démarcation se trace juste au-dessus de la porte de bois. Ceci modifie quelque peu l’aspect des projections et, lors d’une scène, cet axe a été aligné avec le reflet de la forêt dans l’eau d’un lac. La réflexion était inversée de sorte que l’image de la forêt était claire dans la partie inférieure lisse du mur et brouillée par l’onde de l’eau dans la partie sculptée.  Le mur de droite avait deux fenêtres au niveau de l’aire de jeu, dont le fond recouvert d’aluminium était éclairé pour créer l’illusion de lumière naturelle. Nous prenons compte alors de combien reproduire la nature à l’aide de la technique au théâtre fait écho à l’œuvre de Thoreau. Aucun élément de l’architecture et de l’équipement de la salle n’était laissé au hasard. Les deux ouvertures des côtés cour et jardin étaient exposées et même les grilles d’accrochages, à certains moments, étaient éclairées exprès pour créer de l’ombre sur la scène et les murs. 

Emplacement

Ainsi il n’en tenait pas uniquement à l’orientation scénographique pour servir le propos de l’œuvre. Tout le bâtiment participait à la sémantisation. Il est également intéressant de rappeler que la Chartreuse était un palais abritant un cloître monastique et que le Tinel était le réfectoire des moines. Il s’agissait d’un endroit de réunion pour les moines en introspection. Le thème de la solitude dans la multitude est également fort dans Walden ou la vie dans les bois. À noter, également, que la situation géographique de la salle nous a obligés à traverser le Rhône et de sortir de la zone urbaine d’Avignon, pour toutefois se retrouvé entourés de spectateurs dans la salle du Tinel…


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire